C’est avec une profonde tristesse que nous vous faisons part du décès de Lucille Allorge, survenu le mardi 29 aout 2023.
Lucile est née en 1935 à Antananarivo, à Madagascar, où elle passa les premières années de sa vie, avant que la famille ne doive quitter cette grande île qu’elle aimait tant : son père, Pierre Boiteau, fondateur et directeur du Parc Botanique et Zoologique de Tsimbazaza, à Antananarivo, avait en effet pris parti pour ses collègues Malgaches lors des évènements de 1947, préludes à la décolonisation.
En France, Lucile a obtenu un doctorat en Botanique, puis est entrée au CNRS en 1968. Passionnée de botanique de terrain et de phyto-pharmacologie, elle a organisé (et participé à) de nombreuses missions qui l’ont conduite en Guyane, aux Philippines, au Vénézuela, en Malaisie et bien sûr à Madagascar. Après sa retraite, elle a continué à exercer en tant qu’attachée honoraire du Muséum pendant de nombreuses années.
Au cours de sa carrière, Lucile a rédigé plus de cent articles scientifiques dans le domaine de la botanique. En reconnaissance de son expertise, plusieurs espèces ont été nommées en son honneur, notamment l’Aloe lucile-allorgeae, le Kalanchoe lucile-allorgei et le Tityobuthus lucileae.
Elle a également été une auteure captivante, à l’origine de plusieurs ouvrages scientifiques à succès tels que « La fabuleuse odyssée des plantes » et « Namoroka, Mission à Madagascar », qui contribuent à la diffusion des connaissances sur la botanique. Elle a également participé à plusieurs films, tels que « Sur la piste de Wallace », « Les sortilèges de l’île rouge » (Madagascar, Ushuaïa Nicolas Hulot), ou « Le labyrinthe secret de Namoroka ».
Cette femme remarquable, dotée d’une grande générosité, a su inspirer de nombreux collègues qui sont devenus ses amis proches. Elle était très active dans le domaine associatif, et elle accordait une grande importance à plusieurs organisations auxquelles elle appartenait. Parmi celles-ci, on peut citer la Société des explorateurs français, de laquelle elle était membre, l’Académie des Sciences d’Outremer, où elle avait été élue, et la Société Botanique de France, qui lui a décerné le prestigieux prix de Coincy en 2011. Cependant, sa plus grande source de fierté résidait dans son appartenance à l’Ordre du Mérite Malgache. Jusqu’à récemment, elle s’investissait pleinement dans la collecte de fonds en vue d’améliorer la préservation des collections naturalistes à Antananarivo.
Elle avait toujours pour ambition de maintenir en vie la mémoire et les accomplissements des botanistes qui avaient travaillé à Madagascar, afin que leurs travaux perdurent et servent d’inspiration aux générations futures. Elle poursuivait cet objectif en publiant leurs correspondances et en mettant constamment en avant leur travail. Elle était profondément engagée dans le féminisme et exprimait régulièrement son indignation face au manque de visibilité accordé aux femmes botanistes.
Cette femme extraordinaire occupera toujours une position spéciale dans nos cœurs et au sein de la communauté scientifique.
Une cérémonie-hommage sera rendue à Lucile, le mardi 5 Septembre à 15H30 au cimetière d’Orsay (av St Laurent 91100 Orsay)
Catherine Reeb, France Rakotondrainibe,
Agathe Haevermans, Thomas Haevermans du Muséum national d’Histoire naturelle.